Si la fin d’année a été particulièrement mouvementée, avec des indices boursiers qui ont été majoritairement survendus, l’humeur du marché est en train de changer. Dans un environnement qui reste dominé par l’évolution de la « guerre commerciale » que se livrent les États-Unis et la Chine, l’espoir d’un apaisement des tensions entre les deux pays a poussé les investisseurs à revenir sur un marché jugé sous-évalué. Le retour des acheteurs se confirme, le Dow Jones enregistre un gain de +5 ,91% depuis le 1er janvier, le S&P 500 +6,54% et le Nasdaq composite +7,87%.
Le rebond avait démarré grâce à Jerome Powell qui avait surpris positivement les marchés en adoptant un ton plus souple. Un rebond qui s’est accéléré la semaine dernière sur des rumeurs de négociations positives entre la Chine et les États-Unis.
Les négociations accélérées entre Pékin et Washington font espérer une sortie de crise prochaine entre les deux pays. Steve Mnuchin, le secrétaire d’Etat au Trésor, a laissé entendre que les Etats-Unis seraient favorables à une levée partielle ou même totale des droits de douanes sur les importations chinoises.
La Chine de son côté tente de rassurer les marchés boursiers avec la perspective de nouvelles mesures de soutien à l’économie. La Chine a commencé par diminuer les réserves obligatoires des banques, ce qui équivaut à une injection de liquidités. Elle a annoncé également un plan à la Trump, avec baisse d’impôts et plan de relance par l’investissement dans les infrastructures. Le pays montre ainsi qu’il garde la mainmise sur son économie, même si la Chine reste dans l’expectative de son deal commercial avec les Etats-Unis.
Il apparaît, de plus en plus clairement, que chinois et américains ont besoin de calmer le jeu, chacun pour des raisons propres.
Si la baisse des tensions entre Pékin et Washington s’est reflétée positivement sur la tendance, les marchés ont également salué le ton posé de la Réserve fédérale. Les dernières déclarations de Jerome Powell présagent, en effet, d’une approche plus pragmatique. Powell a signifié que dans le contexte d’un ralentissement économique, la Fed pourrait marquer une pause dans son cycle de hausse de taux. Ce qui a rassuré les investisseurs. Il a rappelé que le rôle de la Federale Reserve était de rééquilibrer l’environnement et de gérer aussi cette forme de ralentissement.
La communication parfois mal comprise du président de la Réserve fédérale ajoutée à la pression de Donald Trump, avait soumis les marchés à de fortes craintes concernant la position de Jay Powell face à la conduite de son resserrement monétaire.
C’est un équilibre délicat pour le patron de la Fed. À un moment ou un autre, il va falloir terminer de normaliser cette politique monétaire, qui reste encore accommodante. Mais tant que l’inflation est maitrisée, il n’y a pas de réelle urgence.
Le démarrage de la saison des publications de résultats trimestriels pourrait marquer une tendance plus claire aux marchés. D’autant que les premiers résultats américains sont plutôt de bonne facture (Citigroup, Goldman Sachs, Bank of America), après un début d’année entaché par un warning d’Apple.
Apple, le symbole de la puissance des valeurs Tech américaines a lancé, en début d’année, un avertissement sur ses résultats trimestriels, ce qui a fait chuter la valeur. La société a reconnu que son chiffre d’affaires et ses ventes d’iPhone ont été bien plus mauvais que prévu sur les trois derniers mois de 2018. La décélération de la croissance en Chine et la « guerre commerciale » avec les États-Unis ont eu un impact évident sur les ventes d’iPhone, la Chine étant le troisième marché d’Apple. Mais la stratégie de prix élevé de Tim Cook semble également marquer le pas. Le peu de réelles innovations apportées aux derniers modèles de la marque ne justifient plus leur prix, d’autant que la concurrence est de plus en plus forte.
Coté macro-économie, les chiffres mensuels de l’emploi ont surpris. Alors qu’on parle de ralentissement économique, les créations d’emplois ont dépassé les attentes. A 312.000, elles ont atteint leur plus haut niveau depuis dix mois.
La fermeture des administrations fédérales, depuis près d’un mois, faute d’accord sur le budget pourrait néanmoins perturber l’agenda économique. La situation est inédite, jamais un « shutdown » n’a duré aussi longtemps. Et Trump n’a pas l’air décidé à céder sur son projet de mur avec le Mexique. Les démocrates non plus. C’est en train de tourner au règlement de comptes entre Trump et Nancy Pelosi, présidente de la Chambre des représentants (démocrate). Et l’inquiétude commence à se faire sentir.
Ces blocages ont eu peu d’impact sur l’économie dans le passé, mais ils n’ont jamais duré aussi longtemps.
L’Europe profite également de la bonne tenue de Wall Street. Même le rejet du texte sur le Brexit n’a pas contrarié le marché. Theresa May a pourtant essuyé un cuisant revers au parlement : 432 voix « contre » et seulement 202 voix « pour ».
Malgré cet échec, la Première ministre britannique a survécu le lendemain à une motion de censure déposée contre elle, ce qui a rassuré. Dans cet imbroglio politico-économique, Theresa May reste une figure de stabilité pour les marchés.
Les investisseurs jugent également peu probable le scénario d’un « no-deal » et intègrent, de plus en plus, l’idée que la date limite du Brexit, officiellement fixée au 29 mars 2019, soit repoussée.
En définitive, les marchés font preuve d’une belle résistance qui contraste avec les sur-réactions baissières de décembre.
Pourtant les données économiques ont confirmé le ralentissement économique de la zone euro. Les prévisions de croissance ont été revues à la baisse. Le PIB de la zone était de 2.4% en 2017, 1.9% attendu en 2018, les anticipations dépassent à peine les 1.6% en 2019. En cause, le ralentissement de l’Allemagne, très exportatrice et fortement impactée par les tensions commerciales.
L’Europe inquiète également par la montée de la contestation sociale, illustrée notamment en France par le mouvement des “Gilets jaunes”. Quand vous avez une croissance faible et des politiques d’austérité, ce qui est le cas en Europe, vous avez de l’agitation sociale, comme on peut le voir en Italie, au Royaume-Uni et en France.
Un point positif, néanmoins, le taux de chômage pour l’ensemble de la zone euro a reculé à 7,9% en novembre (contre 8% depuis août).
Malgré une économie globalement décevante, les indices européens enregistrent des gains importants depuis le 1er janvier : +3,07% pour le Cac 40, +4,45% pour l’EuroStoxx. De son côté, le Dax enregistre la meilleure hausse, avec un gain +6,12%, malgré une production industrielle allemande en baisse.
En dépit d’un environnement incertain, les marchés européens semblent pour le moment donner du crédit aux facteurs susceptibles de renverser la tendance, comme la bonne tournure que prennent les négociations commerciales entre Washington et Pékin.
Le rebond reste cependant fragile à l’approche de la saison des résultats du quatrième trimestre, qui occupera les esprits. Les prévisions pourraient être plus prudentes. Le risque principal n’est pas pour les Etats-Unis, dont l’économie reste solide, mais pour l’Europe. Les risques politiques pèsent encore lourdement sur un continent dont la croissance ralentit.
Dans ce contexte, il est peu probable, que la BCE qui vient d’arrêter son programme de rachats d’actifs, puisse commencer à relever ses taux. Mario Draghi, qui s’exprimait il y a quelques jours devant le Parlement européen, a indiqué que si la zone euro ne s’orientait pas vers une récession, son ralentissement pourrait durer plus longtemps que prévu et réclame encore un degré “élevé” de soutien. En conséquence, il n’y a pas d’urgence à relever les taux. Une position très « dovish » qui a soutenu un peu plus le marché. Les investisseurs n’attendent désormais pas de hausse de taux avant 2020.
Du côté des devises, l’Euro avait réussi en début d’année à prendre l’ascendant sur le Dollar, à la faveur d’un ton plus accommodant de la Fed. La paire eur-usd a même réussi à franchir les 1,15, mais elle n’est pas parvenue à se maintenir au-dessus.
Depuis, la devise européenne a été fragilisée par le ton très souple de Mario Draghi, mais également par des statistiques économiques en Europe décevantes. Entre des prévisions de croissance de la zone euro en baisse et une production industrielle allemande qui s’essouffle, la paire est retombée à 1,1360.
Le billet vert profite, de son côté, d’une production industrielle américaine ressortie au-dessus des attentes et de créations d’emplois largement supérieures au consensus. Les espoirs d’avancée dans les négociations entre Pékin et Washington ont également contribué à la bonne tenue du Dollar, de même que la progression des bourses US.
Du côté des matières premières, l’effet positif sur le sentiment de marché a aussi été ressenti sur le marché pétrolier. Après s’être effondré à la fin de l’année 2018, le baril est fortement remonté ces deux dernières semaines. Le Brent caracole désormais autour de 62$ et enregistre, depuis le 1er janvier, un gain de +12,93%. Tandis que le WTI à 53,50$ s’offre une imposante hausse de +14,91%.
La raison de cette remontée spectaculaire ? Alors que l’Opep et ses alliés russes se sont mis d’accord en décembre 2018 pour réduire leur production (et semblent s’y tenir), l’Arabie saoudite, premier exportateur mondial, est allée plus loin en annonçant des réductions encore plus importantes que prévu pour les mois de janvier et de février.
Le début d’année a été un peu plus calme pour l’or qui consolide autour des 1280$. Mais la volatilité continue d’entretenir un sentiment haussier sur le métal jaune. Depuis la déstabilisation qu’ont connu les marchés financiers en fin d’année, l’intérêt pour l’or s’est fortement accru, les investisseurs étant à la recherche de sécurité. Le retour de la volatilité implique généralement le retour des valeurs refuges. Cette année, l’or, actif refuge par excellence, devrait donc encore bénéficier du regain de volatilité qui résulte de la multiplication des risques géopolitiques. L’or a historiquement tendance à mieux performer lorsque la volatilité grimpe.
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