La BCI – Banque Centrale d’Israël – a adopté une approche de Front Loading, préférant augmenter le taux Directeur de manière agressive à un stade précoce, afin de modérer les augmentations par la suite, et ainsi affecter rapidement les anticipations d’Inflation.
Il semble évident que le bon état de l’Économie israélienne a facilité la Banque dans sa prise de décision.
La forte augmentation du taux Directeur le 3/10/2022, à savoir 0.75 %, ramenant ainsi le taux directeur à un taux de 2.75 %, et la conférence de presse ayant suivi cette décision, ont fourni à l’actuel Gouverneur de la BCI, le Professeur Amir Yaron, l’occasion d’expliquer en détail ce qui se cache derrière la politique monétaire de la banque centrale.
Tout d’abord, le Gouverneur a précisé que la baisse de l’Inflation au cours du mois d’août n’avait pas poussé le Comité monétaire à lever le pied, car “nous voyons dans les dernières mises à jour de l’Inflation des processus supplémentaires d’accélération des prix qui empêchent également la demande de produits et services locaux.
Je tiens à le souligner, et ce, en dépit des données d’indice relativement faibles enregistrées au cours du mois d’août : notre politique est coordonnée avec un processus en cours”.
Concernant la politique monétaire menée, le Gouverneur a utilisé à plusieurs reprises le terme de “Front Loading”.
Utilisant directement le terme dans la langue de Shakespeare, le Gouverneur a simplement utilisé l’expression “anticipation et accélération des augmentations du taux Directeur” pour décrire le terme.
En clair, cela signifie que la banque centrale préfère procéder à des hausses agressives des taux d’intérêt à un stade précoce, afin de modérer par la suite le rythme des éventuelles augmentations.
En d’autres termes, si la banque centrale prévoit de réhausser le taux Directeur de 3 % au total, elle ne le réhaussera pas à des taux égaux tout au long de la période, mais procédera à de fortes augmentations au début, puis passera à des augmentations modérées/mineures par la suite.
La logique de cette politique, selon le Gouverneur, est que les hausses rapides, décrétées en amont, affectent rapidement les anticipations d’Inflation, permettant selon le Comité monétaire, “l’ancrage des anticipations d’inflation dans l’objectif de prix, qui est l’un des paramètres clefs de la politique monétaire pour le bon fonctionnement de l’Économie”.
En réponse aux questions des journalistes, le Gouverneur a déclaré : “nous ne voulons surtout pas atteindre les niveaux d’Inflation des pays européens, et avons donc adopté une politique de front-loading.
Une telle politique donne des résultats rapides, permettant d’éviter d’aller à des taux d’intérêt plus élevés à l’avenir, mais également de maîtriser l’Inflation”.
Derrière cette politique, il y a toutefois une bonne nouvelle pour ceux qui craignent les fortes hausses du taux Directeur : les prochaines hausses devraient être plus modérées !
De fait, selon la BCI, le taux Directeur devrait être de 3.50 % d’ici un an (soit encore 8 décisions) ; le Gouverneur estime pour sa part que nous entrons déjà dans une ère de ralentissement de l’Inflation.
Le Gouverneur a rappelé à plusieurs reprises que la vigueur et la stabilité de l’Économie en Israël permettait à la banque centrale de mener cette lutte contre l’Inflation; comprendre, que le dilemme traditionnel entre Inflation et Chômage n’avait pas pesé dans la prise de décision de la BCI.
Selon lui, aussi bien en sa qualité de “Gouverneur de la Banque Centrale d’Israël que d’un point de vue macroéconomique globale, je peux dire que l’Économie israélienne est en bonne position, d’autant plus par rapport à l’état d’autres économies avancées. L’Économie israélienne est solide et à un niveau d’activité élevé, le marché du Travail est tendu, dans un environnement de plein emploi”.
Le Gouverneur a également évoqué à plusieurs reprises le marché du Logement, à la fois en raison de la forte hausse des prix des logements qui a atteint un record annuel d’environ 18 %, mais également en raison du fait de la forte hausse des taux d’intérêt qui devrait favoriser le refroidissement des prix des logements.
Selon lui, “les prix des logements ne sont pas seulement un problème économique, mais aussi un problème social fondamental. L’augmentation des prix de l’année dernière est un problème pour l’Économie et la société israélienne dans son entièreté”.
Il a toutefois souligné le fait que l’on observait actuellement une évolution positive du côté de l’Offre sous la forme d’une accélération du nombre de mises en chantier, ainsi qu’un refroidissement du marché des prêts hypothécaires.
Yaron a réitéré sa position selon laquelle il n’y a pas lieu d’imposer des restrictions supplémentaires en matière de crédits immobiliers : “La clef du problème est du côté de l’Offre. Les réformes en matière d’Offre ne peuvent pas porter préjudice aux ménages (contrairement aux augmentations de taux d’intérêt ou aux restrictions sur les emprunteurs).
Il convient de rappeler qu’en Israël, la situation est déjà très stricte en termes de coefficient d’endettement, ainsi que de ratio financement/valeur de l’actif immobilier”.
Concernant l’effet des tempêtes financières dans le monde (Grande-Bretagne et Suisse) sur la stabilité du système financier en Israël, le Gouverneur estime qu’il “ne fait aucun doute que la volatilité des marchés augmente les risques de stabilité en général. Ce qui s’est passé au Royaume-Uni était prévisible, et nous sommes constamment en état d’alerte afin d’anticiper ce genre de situations. Toutefois, l’exposition des institutions israéliennes reste très faible. Par conséquent, la situation ici en termes de stabilité financière est bonne”.
Pour ce qui est de l’affaiblissement du shekel qui peut provoquer l’accélération de l’inflation, Yaron estime qu’en raison de la volatilité du marché des changes, il est difficile de déterminer ce qu’il convient de faire à ce sujet : “notre décision a été principalement influencée par le fait que nous avons vu que l’Inflation se répartit sur de nombreux tronçons et qu’il y a une augmentation de la Demande, et ce, en raison du fait que l’Économie à la capacité d’absorber cette hausse du taux Directeur.
Il est vrai que le taux de change affecte les prix, mais en ce moment, nous sommes dans l’œil du cyclone sur les marchés, les taux de change sont très influencés par les baisses, et il peut y avoir des fluctuations dans la direction opposée. L’année dernière, nous étions sur un USD à 3.20 ILS”.
Enfin, le Gouverneur a commenté le fait que les banques se sont abstenues d’augmenter les taux de rémunération des épargnes, observant que “dans presque chaque cycle d’augmentation des taux directeurs, un écart se créé entre taux d’emprunt et rémunération des épargnes ; nous l’observons partout dans le monde, même aux États-Unis où il y a un marché avec des milliers de banques.
Cependant, j’enjoins les banques à répercuter au plus vite la hausse du taux Directeur sur les taux de rémunération des épargnes en Israël”.